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Durant les adjudications du mois de mai chez Sotheby’s, Christie’s et quelques rares autres maisons de ventes aux enchères, Genève devient le cœur du monde des bijoux anciens et modernes, des pierres de couleur exceptionnelles et des diamants extraordinaires. À cette même époque et pour la seconde année consécutive, un très séduisant salon, GemGenève, s’est implanté à Palexpo, enrichissant encore l’image de la ville de Calvin.
Alors que, depuis des années déjà, Baselworld avait abandonné les joailliers, les bijoutiers, les négociants en pierres précieuses et les aristocrates des bijoux anciens pour ne penser qu’à l’horlogerie… et encore bien mal si l’on se réfère aux dernières éditions, la révolte grondait. Il y a trois ans, deux grands professionnels – Thomas Faerber, spécialiste en bijoux anciens et pierres précieuses, et son acolyte Ronny Totah, amoureux des gemmes et des diamants – terminèrent la foire en claquant la porte à Bâle. Douze mois plus tard, avec l’aide de leurs deux filles et de l’équipe entraînée de Palexpo, ils inauguraient GemGenève, Geneva International Gem and Jewellery Show. Coup d’essai et coup de maître !
« Après des années de salons et de foires à travers le monde, nous savions exactement ce que nous recherchions si nous avions dû organiser notre propre salon, entonnent en chœur Thomas Faerber et Ronny Totah. Nous privilégierions la qualité, l’éthique et la variété des exposants à la quantité. Une halle intimiste et lumineuse avec, si possible, la clarté du jour, et, pour nos confrères, un confort indispensable : un coffre-fort dans chaque stand, de l’eau fraîche tous les matins et une poubelle de tri sélectif. Le tout dans une ambiance feutrée et chaleureuse afin d’accueillir les professionnels… et le public. » Ainsi fut fait !
Vivier de jeunes talents
Dès la première édition, GemGenève s’est ouvert à la jeunesse, aux étudiants des écoles d’art – particulièrement à la HEAD de Genève (Haute École d’Art et de Design) et, cette année, à la Haute École de Joaillerie de Paris –, aux designers, aux talents émergents, aux plus fous comme aux plus sages. L’an dernier, une étudiante de la HEAD, Camille Combremont, avait remporté un concours de création sur le thème des perles. Cette année, elle se retrouve dans une vitrine de la Faerber Collection avec sa parure en or gris 750 noirci, rythmée de cabochons ronds de pierres de lune sur des maillons à encliqueter soi-même pour réaliser colliers, bracelets et même boucles d’oreilles. Soutenue, et financièrement et par les conseils de Thomas Faerber, elle commence ainsi une carrière certainement prometteuse.
Vivienne Becker, l’une des meilleures historiennes actuelles du bijou – son livre sur Lalique fait référence –, a passé les 12 derniers mois à traquer des jeunes pousses et des designers aux idées ébouriffantes, pour les amener à Genève. Dans son « Vivarium » de l’An 2, Vivienne Becker a entraîné le Russe Tenzo, talentueux joaillier amoureux des pierres précieuses de son pays ; Tatiana Verstraeten et son fabuleux collier de plumes en diamants ; le couple designer/marchand de pierres Racine, qui hésite entre Art déco et classicisme, ou encore l’Américain Sean Gilson, à la fois designer et bijoutier doué. Quant au quatuor suisse des « emerging talents », retenez leurs noms, car ils vous reviendront aux oreilles : Ena Iro et ses immenses bracelets rigides ajourés, entre histoire et tradition, les joyaux-objets de tête de Cléa Horowicz, Pierre d’Alexis et sa calcite rose, qui s’est développée dans d’anciennes mines valaisannes, et Isabelle Siz, dont les bijoux sont un vrai feu d’artifice.
Bijoux anciens et gemmes
Dans le labyrinthe savamment étudié de la halle, le public découvre une soixantaine d’exposants supplémentaires. Pour les amoureux des bijoux anciens, GemGenève est un véritable musée à ciel ouvert. Les exposants ne « tirent pas la gueule », ne vous regardent pas de haut et parlent volontiers des pièces, des signatures et même des poinçons. Pas de problème pour obtenir un prix et l’explication qui va souvent avec. Même accueil gratifiant chez les négociants en pierres de couleur, qui souvent sont indiens, américains ou russes. Avec gentillesse, ils vous expliquent la différence entre une pierre chauffée ou non chauffée et l’énorme différence de prix qui l’accompagne. Mention spéciale pour le marchand de pierres « Valentina », qui vend rubis et saphirs non chauffés tous retaillés par un excellent lapidaire parisien.
Chacun sort volontiers sa ou ses copie(s) de certificat(s) internationalement reconnu(s). La Suisse se taille la part du lion avec les laboratoires SSEF (Zürich), GGTL (Genève et Liechtenstein), Gübelin (Lucerne). Le GIA (Gemological Institute of America), probablement l’un des laboratoires les plus célèbres si ce n’est le plus célèbre, est présent pour faire la promotion de ses certificats mais également pour attirer de nouveaux étudiants au titre de GG (Graduate Gemologist). Quant aux diamants, toutes les grandeurs, toutes les formes et toutes les couleurs sont à votre disposition et à celle de votre portefeuille.
Une formation de quatre jours
En quatre jours, grâce au programme de conférences sur des thèmes très variés et à des animateurs de haut-vol, il était possible de se former sur les styles de bijoux, les pierres à la mode selon les époques et même de se gorger d’anecdotes à réutiliser dans les dîners en ville (« Muses and Collectors » par Vanessa Cron). Plusieurs sessions d’une vingtaine de personnes ont permis au public de prendre les bijoux entre leurs mains, de les observer à la loupe après une rapide formation, et de s’échanger informations et cartes de visite. Il est certain que chacun est sorti de ce salon plus intelligent qu’il n’y était entré.
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